Pleine conscience et action

Janvier…. Voici venu le moment des « bonnes résolutions » : faire du sport, passer plus de temps avec ma femme (mon mari) et mes enfants, manger plus équilibré, reprendre contact avec des ami(e)s perdu(e)s de vue, me réconcilier avec tel membre de ma famille, reprendre la rédaction de mon livre, me remettre au piano, à la guitare ou à la méditation, etc….

 

Mais souvent ces bonnes résolutions tombent à plat parce que l’intention, même si elle est évidemment nécessaire, n’est pas suffisante. Si ces actions que nous comptions plus ou moins faire l’année précédente n’ont pas été faites, c’est probablement qu’il y avait des obstacles à leur réalisation et que ces obstacles n’ont pas disparu comme par enchantement avec la nouvelle année. Mais rien n’est perdu. La pratique de la pleine conscience et le contact avec nos valeurs (tel qu’ils sont mis en œuvre dans le cadre des thérapies ACT) peuvent nous aider à dépasser ces obstacles.  

 

Voici quelques suggestions :

 

Relier mon action à mes valeurs

Tout d’abord, est-ce que je peux rattacher l’action envisagée à quelque chose qui est important pour moi dans la vie, quelque chose qui peut donner du sens à ma vie, autrement dit, dans le vocabulaire ACT, une valeur ? 

 

Par exemple si vous envisagez de vous remettre au sport cela peut être pour « être en forme » ou « prendre soin de ma santé ». « Être en forme physiquement », « prendre soin de ma santé » sont pour vous des valeurs qui peuvent, si vous y penser, vous motiver pour passer à l’action : « faire du sport ».

 

La particularité des valeurs, qui vous sont personnelles et que vous choisissez, est que le fait d’agir dans leur sens peut vous apporter un sentiment de satisfaction qui sera une source de motivation pour vous, même si cela demande un effort.

 

Si votre réponse à la question : « pourquoi est-ce que je veux faire du sport ? » est : « pour maigrir », cela peut constituer une bonne source de motivation mais ce n’est pas une valeur, c’est un objectif ;  la différence étant qu’une valeur est une direction de vie vers laquelle on peut toujours avancer alors qu’un objectif est un point précis qui, une fois réalisé, est réalisé. Si votre réponse est de ce type, vous pouvez alors vous poser la question : « mais pourquoi est-ce que je veux maigrir ? », vous trouverez alors peut-être une réponse appartenant au domaine des valeurs comme : « être en forme », « être en bonne santé », « améliorer mes relations sociales », etc….

 

Donc identifier et contacter les valeurs qui sont à la source de mon action peut être une première aide pour passer de la résolution à l’action mais cela ne sera sans doute pas suffisant si des obstacles externes et/ou internes importants sont présents

 

Identifier les obstacles

Qu’est ce qui peut faire obstacle au fait de réaliser une action qui me tiendrait à cœur parce qu’elle aurait du sens pour moi ? On peut distinguer deux types d’obstacles : les obstacles externes et les obstacles internes.

 

Les obstacles externes

On pourrait définir les obstacles externes comme des obstacles matériels liés soit à votre environnement soit à vos compétences actuelles sur le plan physique ou en termes de connaissances. Pour poursuivre dans le domaine sportif, si vous envisagez de vous mettre à l’aviron, ces obstacles externes peuvent être  : coût de la licence, horaires des entrainements, vous ne savez pas nager, conditions physiques insuffisantes, etc…..

 

Une démarche est possible pour surmonter ces obstacles :

Elle consiste à faire de votre action un objectif à atteindre et à imaginer des actions intermédiaires qui pourraient vous aider à progressivement atteindre cet objectif. Dans l’exemple présent, cela sera prendre des cours de natation, commencer à économiser pour me payer la licence l’année suivante, faire de la remise en forme en travaillant avec un rameur à mon domicile ou dans une salle de sport, voir comment je peux aménager mon emploi du temps. Quand, étant au point A, on veut aller au point Z il faut souvent passer par B, C, D etc… Donc même si vous ne pouvez faire immédiatement l’activité que vous souhaitiez, chaque action vous rapproche de votre objectif et par là-même de ce qui sous-tend votre objectif, à savoir vos valeurs. Par exemple si une des valeurs qui sous-tend votre souhait de faire de l’aviron est : « prendre soin de ma santé physique », faire de la remise en forme en salle est aussi directement au service de cette valeur. Ainsi même si au pire vous ne pourriez jamais faire de l’aviron, vous auriez néanmoins avancer vers vos valeurs, ce qui est déjà une source de satisfaction importante.

 

Mais les obstacles externes peuvent aussi se doubler d’obstacles internes et ce sont souvent ceux qui posent le plus problème.

 

Les obstacles internes

Les obstacles internes sont liés à ce que nous nous disons ou à ce que nous ressentons à l’idée d’engager l’action envisagée. Il s’agit donc des pensées et des émotions.

 

Pour poursuivre le fil de nos résolutions de début d’année, une d’elles peut avoir été de : « me booster » pour chercher un nouvel emploi. Le travail que je fais est confortable et me permet de gagner ma vie mais je m’y ennuie et ne correspond pas ou plus à mes aspirations profondes. Ors quand j’envisage cela de nombreuses pensées et émotions montent automatiquement en moi : « est-ce que j’en suis capable ? », « est-ce que je ne vais pas essuyer des refus ? », « Comment est-ce que je vais pouvoir supporter cela ? », « et même si je suis accepté, est-ce que je vais être à la hauteur ? »,etc., etc., ces pensées générant automatiquement des ressentis émotionnels comme l’appréhension, l’inquiétude, la peur. Toutes ces idées et ces émotions qui apparaissent à l’intérieur de nous, rien qu’à l’idée d’engager une action, sont très désagréables et la réaction spontanée qui se présente alors, et qui est tout à fait normal parce que nous n’aimons pas ce qui est désagréable, est de laisser tomber l’idée et de continuer notre vie habituelle. Mais le problème à ce moment là est que nous nous coupons alors de nos aspirations profondes et de nos valeurs et qu’à long terme cette coupure peut avoir des effets négatifs sur notre bien-être psychologique voire physique comme certaines études scientifiques le montrent.(cf le numéro de la revue Cerveau et Psycho de janvier 2019).

 

Alors que faire. Tout d’abord, il faut se dire que ces pensées et émotions négatives qui apparaissent quand nous envisageons une action inhabituelle sont tout à fait normales parce que nous sortons de ce qu’on appelle notre « zone de confort ». C’est une réaction automatique de l’organisme qui cherche toujours à se protéger de dangers éventuels. Cette réaction est le produit de notre évolution qui fait que notre cerveau envisage toujours le pire, ce qui a eu pour fonction de nous protéger réellement dans les temps préhistoriques mais qui n’est plus complètement adapté à nos temps modernes où les dangers objectifs et réels (sauf situation exceptionnelle) sont beaucoup moins présents.

 

L'obstacle des mots

Il faut bien voir ici ce qui nous ferait reculer devant l’action n’est pas un danger objectif et réel dans l’environnement mais une pensée, c'est-à-dire, si nous regardons cela de près, des mots ! Ceci est aussi en lien avec notre évolution humaine qui a fait de nous des êtres de langage, langage qui nous permet de communiquer, d’imaginer, de créer, de concevoir, d’abstraire mais qui, quelques fois, si nous n’y prenons garde, filtre et biaise notre rapport à la réalité voire s’y substitue et nous « fait prendre des vessies pour des lanternes ».

 

Donc ces pensées négatives sont automatiques, elles ne sont pas, pour la plupart, le fruit d’une réflexion et il est donc important de les voir pour ce qu’elles sont. C’est là que la pratique de la pleine conscience peut nous aider. Sans rentrer ici dans le détail, les exercices de pleine conscience nous aident tout d’abord à retirer notre attention des pensées par lesquelles elle est souvent emportée en la dirigeant vers ce qui est toujours bien là et réel à savoir notre respiration, nos sensations corporelles et notre environnement physique puis à adopter une position d’observateur vis-à-vis de ces pensées comme si nous observions des objets extérieurs à nous. Cette position d’observateur, préparée par l’ancrage dans le moment présent, permet de nous dégager du contenu des pensées et de faire le tri entre celles qui peuvent être utiles pour avancer vers nos projets et celles qui auraient plus tendance à nous enfermer.

 

L'obstacle des émotions

L’autre obstacle important qui peut nous empêcher d’avancer vers nos projets est celui des émotions négatives, ces émotions étant bien sûr le plus souvent en lien avec les pensées automatiques négatives. Dans l’exemple utilisé ces émotions sont du registre de la peur qui peut se décliner en appréhension, inquiétude, angoisse, etc.. Le rapport spontané que nous avons avec ces émotions est un rapport de fuite ou d’évitement, ce qui, comme nous l’avons évoqué plus haut, est tout à fait normal parce que nous sommes programmés en tant qu’organisme psycho-corporel à faire cela. Dans l’exemple utilisé d’un projet de changement de travail, la fuite consisterait à ne rien faire et poursuivre notre activité professionnelle habituelle. Nous avons déjà également évoqué les effets négatifs de cette attitude à long terme même si elle nous soulage sur le moment. Là aussi la pratique de la pleine conscience nous aide à travers de pratiques spécifiques à faire autrement avec ces émotions, c'est-à-dire à adopter une attitude d’accueil et d’ouverture plutôt qu’une attitude de lutte ou de fuite (voir la pratique d’accueil des émotions difficiles). Nous pouvons à travers ces pratiques et progressivement dans le quotidien faire l’expérience que paradoxalement plus nous accueillons nos émotions difficiles moins elles sont d’emprise sur nous et plus nous sommes libres d’agir consciemment dans le sens que nous avons choisi.

 

Voilà, j’espère que ces quelques suggestions vous seront utiles pour aborder l’année 2019 et je vous souhaite d’en faire une année riche de projets et de sens pour vous.